La beauté des contradictions « in-tranquilles »
“Ils parlent de plaisir, de sérieux mais aussi d’authenticité et de légèreté. Dans le travail que les architectes Andrea Marcante et Adelaïde Testa, ex de chez UdA, ont entrepris ensemble depuis la création de leur agence en 2014, il y a en effet un peu de tout cela. Et bien plus encore. Entre théorie du conflit, aspirations légitimes et culture vénitienne, rencontre autour de Ca’ Select, l’un de leurs derniers projets architectural.”
Propos recueillis par Fabienne Dupuis
Photos : © Helenio Barbetta
Pourquoi est-il important de réinventer l’espace ?
Andrea Marcante et Adelaïde Testa : Réinventer un espace signifie accepter les changements sociaux et culturels, en reconnaissant les nouveaux besoins des individus et des citoyens. Ce processus de réinvention nécessite une sensibilité constante aux évolutions sociétales et la capacité de s’adapter de manière créative pour relever les défis émergents. Nous adhérons fortement aux principes de Gio Ponti, selon lesquels un espace doit être perçu dans sa longueur de perspective maximale. Nous visons systématiquement à aider le regard à traverser tout l’espace et ainsi à élargir la perspective visuelle.
Parlez-nous davantage de Ca’ Select…
Andrea Marcante et Adelaïde Testa : Le projet Ca’ Select est une entreprise ambitieuse, développée pour la marque Select (Groupe Montenegro), qui vise à explorer la culture vénitienne. C’est un espace qui, dès ses premières étapes de conception, cherche à trouver un équilibre délicat entre la marque de cet amer vénitien et la ville où il est né. C’est un espace offert à la ville pour des actions culturelles dont Venise st si friande. Ca’ Select est un morceau d’histoire industrielle qui reprend vie au travers du prisme de notre modernité.
Quelles furent vos inspirations pour ce projet ?
Andrea Marcante et Adelaïde Testa : Le lieu est un récit tissé de petits fragments qui s’entrelacent : l’histoire du produit s’entremêle avec l’histoire, la culture et l’artisanat de la ville et aujourd’hui il fait partie d’un projet architectural et du parcours de son musée. C’est à travers le parcours d’exposition, organisé par le Studio Fludd, que de précieux récits et anecdotes liés à Select, mais surtout à l’histoire vénitienne, sont revisités l’aide de technologies et de langages contemporains.
Parlez-nous un peu plus des matériaux que vous avez choisis ?
Andrea Marcante et Adelaïde Testa : Nous avons imagine un voyage à travers des expériences artisanales uniques et propres à Venise, avec l’intention que des matériaux précieux comme le terrazzo, la mosaïque, le verre et les textiles puissant être réinterprétés de façon contemporaine, mettant en valeur le processus artisanal exceptionnel resté inchangé depuis des siècles. Par exemple, la maison Orsoni a créé la mosaïque qui orne la partie inférieure des murs d’entrée, en suivant le concept que nous avions imaginé, lui-même inspiré des croquis de Mariano Fortuny. Ce processus, de l’idée à la réalisation, crée des connexions entre différentes époques liées à l’histoire vénitienne.
Quelles difficultés avez-vous rencontrées en travaillant sur le projet ?
Andrea Marcante et Adelaïde Testa : Le but était de mettre en valeur le produit tout en établissant un lien avec la ville et ses événements, mais l’une des plus grandes difficultés fut plus triviale et liée à celle d’un chantier situé au centre d’une ville lacustre, entre acqua alta ou l’inverse, acqua bassa !
Quelles sont les caractéristiques uniques de l’identité vénitienne ?
Andrea Marcante et Adelaïde Testa : Lauren Grace Morris disait récemment dans Frame Magazine que « le patrimoine culturel donne une âme à une ville, et la création d’espaces immersifs qui exaltent l’histoire et la tradition locale, ouvre la voie à des moments forts d’adhésion. Dans une ville comme Venise, ces points de contact sont essentiels ». Le projet Ca’ Select « utilise un espace commercial à es fins culturelles, en créant une expérience vénitienne authentique et enrichissante pour la communauté locale».
Pour nous, l’identité de Venise réside dans sa culture, qui doit être entretenue pour rester la raison première d’un tourisme plus attentif et conscient de sa valeur et de sa fragilité.